La lune de miel de la Chine avec une croissance exponentielle serait-elle en train de se terminer ? C’est la prévision de la Banque mondiale, dans un rapport trimestriel publié aujourd’hui.
Selon l’institution, la croissance de l’ex-Empire du Milieu va continuer à décélérer cette année, appelant à des réponses rapides de la part des autorités chinoises. Fortement dépendante des exportations, la deuxième économie mondiale souffre des difficultés de ses principaux marchés, Europe en tête, et va devoir engager davantage de dépenses budgétaires, selon ce rapport semestriel consacré aux économies émergentes d’Asie. « Le défi à court terme pour la Chine est de soutenir l’économie pour parvenir à un atterrissage en douceur », selon la BM qui estime que « le ralentissement actuel est en partie bienvenu dans la mesure où il reflète une décélération de la croissance qui se situait à un niveau supérieur à son potentiel ». « Tandis que la probabilité d’un ralentissement graduel reste élevée, des inquiétudes se font jour sur une croissance qui ralentirait trop vite. Toutefois, des marges de manoeuvre suffisantes existent pour répondre à ce risque », ajoute l’institution basée à Washington.
Selon la Banque mondiale, l’économie chinoise devrait connaître en 2012 une croissance de 8,2%, contre 9,2% en 2011 et 10,4% en 2010. « Une poursuite du ralentissement de la demande (dans les pays à revenus élevés) va se transmettre rapidement aux chaînes de production et de commercialisation en Asie orientale, où la Chine occupe une position centrale », prévient la Banque mondiale. « Deuxièmement, le principal risque interne vient de la poursuite de la correction sur le marché immobilier chinois, quand bien même cet ajustement est resté jusqu’à présent graduel et ordonné », analyse le rapport. Les inquiétudes concernant la santé de l’économie chinoise ont été ravivées par de mauvais indicateurs économiques publiés par Pékin pour le mois d’avril. La croissance de la production industrielle, des importations, des exportations, des investissements en capitaux fixes ainsi que le volume des nouveaux prêts ont tous diminué le mois dernier.
Depuis, la banque centrale chinoise a annoncé une baisse des réserves obligatoires des banques, augmentant ainsi les sommes d’argent qu’elles peuvent prêter. Le gouvernement chinois a arrêté pour cette année un objectif de croissance de 7,5% du Produit intérieur brut (PIB), afin de prévenir une augmentation du chômage et d’éviter les troubles sociaux. Tout en encourageant le gouvernement chinois à des dépenses budgétaires supplémentaires, la Banque mondiale met en garde contre des investissements massifs dans les infrastructures qui avaient caractérisé la réponse de Pékin à la crise financière de 2008, et avaient provoqué de l’inflation. « Des mesures budgétaires pour soutenir la consommation, comme des baisses d’impôts, des dépenses de protection sociale et d’autres mesures sociales devraient être considérées prioritairement », selon le rapport.
Une croissance moins élevée en Chine pèsera sur l’ensemble des économies en développement de la région Asie-Pacifique pour lesquelles la Banque mondiale prévoit une croissance de 7,6% en 2012, contre 8,2% en 2011. Les exportateurs de matières premières dans la région ont connu un boom en 2011 mais pourraient se montrer vulnérables si le ralentissement chinois est plus fort que prévu, provoquant une chute des cours. Alors que la Banque appelle certains pays à soutenir la consommation des ménages, « pour d’autres, plus d’investissement, particulièrement dans les infrastructures, offre un potentiel de soutien à la croissance ».
La Banque mondiale estime que dans l’ensemble, la région Asie-Pacifique est bien armée face à nouvelle volatilité des marchés mondiaux. « De nombreux pays affichent des excédents de comptes courants et de hauts niveaux de réserves » de change, selon Bert Hofman, économiste en chef de la BM pour l’Asie orientale et le Pacifique, qui juge aussi que « les systèmes bancaires sont en général bien capitalisés ». « Toutefois, des risques émanant de l’Europe pourraient affecter la région à travers des circuits commerciaux et financiers », selon M. Hofman.